La guerre en Ukraine a engendré une nouvelle passe d’armes entre la gauche et la droite du Grand Conseil à la fin du mois dernier. Jean-Luc Bezençon, agriculteur à Goumoens-la-Ville demandait au Conseil d’État d’intervenir auprès de la Confédération pour renforcer la production alimentaire et le taux d’auto-approvisionnement du pays. A gauche, on a dénoncé une agriculture «intensive avec traitements chimiques qui n’est pas digne d’une politique du XXIe siècle», à droite on a ironisé sur les députés « bisounours » qui méconnaissent le métier d’agriculteur, rapporte 24 Heures. Pour Serge Melly, agriculteur et syndic de Crassier, rien ne justifie des mesures qui tuent la biodiversité. Il faut commencer par préserver les terres agricoles et réserver la densification exclusivement aux zones déjà bâties. La résolution du député Bezençon a été adoptée par 69 oui, 60 non et 2 abstentions.

Pour assurer l'approvisionnement alimentaire, commençons par préserver les terres arables

Voici son intervention in extenso :

Stop à la récupération politique !

« La récupération, c’est la bonne combine, nous assurait l’ancien conseiller d’Etat Marthaler. Mais la récupération politique d’événements tragiques pour promouvoir des idées conservatrices, ça un coté très déplaisant, à la limite indécent.

On nous a déjà fait le coup il y a quinze jours en profitant de la guerre en Ukraine pour proposer d’étoffer notre armée suivant l’adage romain : si tu veux la paix prépare la guerre. Mais cet adage s’est révélé faux depuis 20’000 ans et les Romains auraient été mieux inspirés de dire : si vis pacem, para pacem !

Quand je pense qu’on est prêt à construire un centre d’entraînement pour un club de football en pleine campagne sur des centaines de m2. Ou prêt à promouvoir des plans de quartier en périphérie des villes, comme à Yverdon ou à Blonay, pour citer les projets dont je me souviens par lecture de la presse. La zone agricole doit être déclarée intouchable, point !

Densification en territoire bâti

En contrepartie, il faut bien sûr supprimer un maximum d’embûches pour la construction dans l’espace déjà bâti et déjà soustrait à la production agricole. Au nom d’études démographiques à quatre sous, on interdit, dans certaines communes, la

Serge Melly, agriculteur, député et syndic de Crassier estime que rien ne justifie des mesures qui tuent la biodiversité. Il faut commencer par préserver les terres agricoles et réserver la densification exclusivement aux zones déjà bâties.
Second épisode aujourd’hui, j’ai bien dit et j’espère second et non deuxième épisode avec une attaque en règle contre la biodiversité et les nouvelles méthodes de culture qui tendent à se passer d’engrais et d’antiparasitaires. Vu leur coût désormais exorbitant, c’est peut-être justement le moment d’en éviter l’emploi.

Pas de centre de football en pleine campagne !

Car avant de labourer les prairies florales et autres prairies écologiques, il y a des solutions pour maintenir et augmenter la surface nourricière.

Appliquer la LAT de façon plus stricte et geler tout projet de construction hors de l’espace bâti !

densification de zones à faible densité, mesures indécentes lorsqu’on connaît la rareté du terrain à bâtir. Il faut construire les villes dans les villes et les villages dans les villages et ne plus toucher, sous aucun prétexte, sauf d’utilité publique, aux surfaces d’assolement. Hic et nunc !

Renoncer à la culture du tabac !

Mais surtout, il est temps de ne plus soutenir des cultures dont on peut se passer, dont on doit se passer. Il n’est plus admissible de produire sur de bonnes terres arables du tabac que l’on doit remplacer par du froment.
On fera d’une pierre deux coupes en augmentant la production de céréales et la diminution de drogue !

Cette culture était un créneau de diversification agricole, à une époque où l’on devait affronter un lac de lait et une montagne de beurre. Elle est indécente aujourd’hui face à la pénurie. Avec ce risque, les nouvelles tendances vont également s’affirmer. Eviter le gaspillage alimentaire, manger moins de viande, ces mesures vont devenir la norme ! Et bien sûr reconsidérer notre position sur les farines animales. Avant de s’attaquer à la biodiversité, réfléchissons à toutes les mesures qui pourraient prises pour limiter une éventuelle pénurie. »