Un mur de soutènement massif en plein périmètre de protection de Lavaux a failli se construire en catimini par l’Etat de Vaud. C’est grâce à la vigilance de vignerons et à l’action de la commune de Bourg-en-Lavaux qu’a pu être mis le holà. En juin dernier le député Vaud Libre Jérôme Christen a interpellé le Conseil d’Etat à ce sujet s’étonnant que ses services se permettent de réaliser des travaux conséquents dans une zone aussi sensible que celle de Lavaux, patrimoine mondial de l’UNESCO, sans mise à l’enquête publique.
D’autant plus que ces travaux portent une atteinte esthétique évidente au paysage en raison de leur caractère massif, de leur teinte et d’une visibilité des ancrages pérenne. Selon 24 Heures, l’Office fédéral de la culture vient de s’en mêler et demande une correction du projet considérant qu’il porte atteinte au site de Lavaux. Le projet devra être soumis à la Division cantonale des monuments et sites. N’aurait-il pas fallu commencer par là ?
Voici le texte intégral de l’interpellation et le lien avec le papier de 24 Heures
Interpellation intitulée : Un mur d’incompréhensions à Bourg-en-Lavaux
Un mur de soutènement massif en plein périmètre de protection de Lavaux a failli se construire en catimini, rapporte 24 Heures dans son édition de samedi. Etonnant, car selon la Loi cantonale sur l’aménagement du territoire (LATC), « aucun travail de construction ou de démolition, en surface ou en sous-sol, modifiant de façon sensible la configuration, l’apparence ou l’affectation d’un terrain ou d’un bâtiment, ne peut être exécuté avant d’avoir été autorisé. (…) les travaux de construction ou de démolition doivent être annoncés à la Municipalité. Ils ne peuvent commencer sans la décision de cette dernière. Dans un délai de trente jours, la municipalité décide si le projet de construction ou de démolition nécessite une autorisation». D’autant plus étonnant dans une région protégée par la Loi sur le plan de protection de Lavaux.
Grâce à la vigilance de vignerons
C’est grâce à la vigilance de vignerons et à l’action de la commune de Bourg-en-Lavaux qu’a pu être mis le holà. « La Municipalité a saisi le Tribunal cantonal et forcé le Canton à soumettre son projet de réfection à la population. Les cinq oppositions déposées début avril – une de la Commune de Bourg-en-Lavaux, quatre des propriétaires des parcelles concernées – ont été levées, mais des modifications ont été apportées au projet.
L’affaire a commencé en novembre dernier, lorsque la division infrastructures de la Direction générale de la mobilité et des routes (DMGR) a organisé une séance d’information avec une vague présentation du projet (sans préciser qu’il ne serait pas mis à l’enquête publique), puis a annoncé le début des travaux une semaine avant ceux-ci. C’est à ce moment-là que les vignerons concernés ont appelé la Commune à la rescousse. Cette dernière a alors exigé une décision de non mise à l’enquête pour pouvoir la contester en justice. Le Tribunal cantonal a refusé d’accorder l’effet suspensif, mais la DGMR a quand même accepté de mettre à l’enquête « à titre exceptionnel ».
Pierre Bays, responsable de la DGMR, se justifie en expliquant que règlement d’application de la loi cantonale sur les routes indique que «les travaux d’adaptation et d’entretien sur le domaine public ne sont pas soumis à l’enquête publique», pour autant qu’il n’y ait pas d’expropriation et que l’ouvrage soit similaire.
« Au delà du simple entretien »
Selon Jean Christophe Schwaab, municipal des Travaux et Infrastructures de Bourg-en-Lavaux: «dès le moment où l’on construit un mur beaucoup plus grand que le précédent, qui a un fort impact sur le paysage, on est au-delà du simple entretien.» Il ajoute que «le signal est assez mauvais pour tous ceux qui se donnent la peine de faire les choses dans les règles». En outre, selon 24 Heures, cette possibilité d’agir sans consulter la population semble réservée au Canton – les lois communales et fédérales n’indiquent en tout cas pas cette exception.
Les oppositions ont permis de provoquer des rencontres et de modifier le projet cantonal notamment par la réalisation de rampes en lieu et place d’escaliers, pour tenir compte de l’évolution des pratiques des viticulteurs. L’un des vignerons opposant, Antoine Bovard déplore qu’on ne prenne en compte «que l’urgence sans voir la globalité» d’un glissement de terrain connu depuis plus de vingt ans estimant que «c’est un emplâtre sur une jambe de bois». La réponse de Pierre Bays est édifiante : «la responsabilité du Canton est de protéger la route, pas tout le territoire. »
Dans ce contexte, nous posons les questions suivantes au Conseil d’Etat :
- Comment le Conseil d’Etat justifie-t-il le fait que ses services pourtant toujours très orthodoxes dans l’application de la LATC vis-à-vis des communes se permette de réaliser des travaux conséquents dans une zone aussi sensible que celle de Lavaux, patrimoine mondial de l’UNESCO, sans mise à l’enquête publique?
- Quels enseignements tire-t-il pour l’avenir face à des cas similaires ?
- N’estime-t-il pas par qu’une vision globale de l’aménagement en collaboration avec les propriétaires privés aurait-été plus judicieuse afin de trouver une solution pour le long terme ? Si oui, entend-il à l’avenir modifier sa pratique, si non pourquoi ?
- Comment le Conseil d’Etat justifie-t-il la construction de murs plus volumineux qui portent une atteinte esthéthique évidente au paysage en raison de leur caractère massif, de leur teinte et d’une visibilité des ancrages pérenne, dans un secteur aussi sensible que Lavaux, régie par la Loi sur le plan de protection de Lavaux. Une solution moins envahissante ou du moins plus esthéthique n’aurait-elle pas été possible?
- La commission consultative de Lavaux a-t-elle été sollicitée en amont du projet et si oui, qu’a-t-il été fait de son avis ?
L’Office fédéral de la culture demande à l’Etat de Vaud des modifications au projet de réfection d’un mur situé au cœur de Lavaux Unesco.