Le logement est un bien de première nécessité. Compte tenu de la part conséquente qu’il pèse sur le budget des ménages et des effets pervers du marché, il est essentiel que les communes puissent en contrôler une partie. Pour y parvenir, Les Libres ont proposé, il y a 11 ans d’instituer un droit de préemption. Il a été introduit dans la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (L3PL) entrée en vigueur il y a 5 ans après un vote populaire. Les milieux immobiliers qui ont perdu leur référendum ne l’ont toujours pas digéré. Ils multiplient les attaques dans le but d’en limiter les effets. Il va falloir rester vigilant.

Il faut préserver les logement à prix aborable. Image: Christiane M. sur Pixabay
GRANDES MANOEUVRES À PRILLY – On l’a vu à Prilly où le PLR local aligne les actions politiques et judiciaires, pour l’essentiel des manoeuvres qui visent à retarder l’acquisition par la commune d’une parcelle permettant son transfert à la Société coopérative d’habitation de Lausanne et la réalisation de 200 logements à loyer abordable. Les élus PLR avaient d’ailleurs été jusqu’à quitter la salle du Conseil communal pour tenter de faire sauter le quorum; heureusement sans succès grâce au courage de deux dissidents que l’on peut qualifier de « courageux démocrates »
PAS D’ATTEINTE A LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE – Contrairement à ce qu’affirment les milieux immobiliers le droit de préemption ne porte en aucun cas atteinte à la propriété privée: en vertu de ce droit, une commune ne peut se porter acquéreur que d’un bien qu’un propriétaire a décidé de vendre et aux mêmes conditions qu’il vient de conclure avec son acheteur. Il y a en plus des mesures qui ont été prévues pour ne léser personne, notamment la prise en charge par la commune des frais engagés par le vendeur et l’acheteur.
ATTAQUE DES PROFESSIONNELS DE L’IMMOBILIER – La dernière attaque contre le droit de préemption en date émane de Nicolas Sabater, membre du comité de L’USPI-Vaud (Union suisse des professionnels de l’immobilier) qui estime que certaines communes utilisent cet outil à mauvais escient. Il cite l’exemple de la ville de Lausanne qui a acquis un bien déjà construit et entend le confier à une coopérative en lui accordant un droit de superficie. Du point de vue de la ville de Lausanne, l’opération a plusieurs avantages: elle permet de préserver des logements à prix abordables, elle a garantit à la ville un rendement de 3% sur le prix du terrain dont elle reste propriétaire et assure la rénovation énergétique des bâtiments (à charge du futur acquéreur).
PRESERVATION DU PARC LOCATIF, FONDEMENT DE LA LOI – M. Sabater aimerait que le droit de préemption « ait pour objectif uniquement la création (et non la préservation) de nouveaux logements d’utilité publique, comme, dit-il, cela a été initialement prévu par la L3PL ». M. Sabater se trompe à double titre: il devrait d’abord s’attarder quelques secondes sur le titre du texte voté par le parlement, puis par le peuple « Loi sur la préservation… » Sortir la notion de préservation viderait le texte de sa substance, et bafouerait la décision du Grand Conseil et celle du peuple. Un jugement du Tribunal cantonal l’a confirmé.
LE PEUPLE A TRANCHÉ, RECONNAIT OLIVIER FELLER – Le directeur de la Chambre vaudoise immobilière Olivier Feller a eu d’ailleurs l’honnêteté de le reconnaitre l’an dernier dans 24 Heures le 25 mars 2022: «Un des enjeux principaux du débat qui a précédé la votation de février 2017 portait sur le champ d’application du droit de préemption. Le comité référendaire critiquait fortement le fait que le droit portait aussi sur les immeubles construits. Nous nous sommes battus. Le peuple a tranché: il a le mot de la fin.»
AU BÉNÉFICE DES LOCATAIRES ET DES COMMUNES – Grâce à la Loi sur la préservation et la promotion du marché locatif (L3PL), l’argent qui allait dans la poche du propriétaire privé reste dans celles des locataires et pour une petite partie dans celle de la collectivité publique pour la location du terrain. On peut comprendre que cela ne plaise pas à M. Sabater mais il doit bien comprendre que l’objectif d’une collectivité publique est de défendre l’intérêt… public!

Le reportage de 24 Heures sur le jugement du Tribunal cantonal sur ce lien.
https://www.24heures.ch/la-justice-valide-lachat-force-dun-immeuble-par-la-ville-192564214194