Le parlement vaudois a classé cinq pétitions citoyennes émanant de parents d’élèves et d’enseignants de l’Ecole technique et des métiers (ETML). L’affaire n’en est pas pour autant close. La direction de l’enseignement obligatoire refuse toujours de reconnaître la mauvaise gestion de ce dossier et de rendre justice aux victimes de cette incurie. Ni le gouvernement vaudois ni la commission des pétitions n’ayant répondu à ses questions lors du débat, le député libre Jérôme Christen les a transmises à la commission de gestion.
Pour remettre les choses dans leur contexte, rappelons que des élèves avaient été accusés d’avoir harcelé une de leurs camarades par des messages électroniques. Un père avait pris la défense de son fils, injustement accusé et avait été licencié en raison d’excès d’ironie à l’encontre de l’école vaudoise pour laquelle il travaillait en qualité d’enseignant. Cinq pétitions de parents d’élèves et enseignants avaient été déposées au Grand Conseil sur les agissements discutables de la direction de l’ETML cautionnés par le département en charge de la formation.
Voici l’intervention du président du groupe des Libres, Jérôme Christen
Les Libres sont étonnés que ces pétitions soient écartées d’un revers de main avec une approche superficielle. Certains dossiers ne peuvent pas être traités en deux coups de cuillère à pot. La lumière est loin d’être faite sur cette triste affaire qui a vu un père défendre son fils le plus logiquement du monde et faire l’objet d’un licenciement qui au vu du déroulé des faits, peut être qualifié d’abusif.
La manière dont cela s’est passé donne le sentiment que nous vivons dans un Etat autocratique où l’on s’ingénie à étouffer la critique. Nous jugeons le rapport de la commission des pétitions particulièrement léger dans la mesure où la presse nous dit largement plus, de même que les représentants des pétitionnaires pour autant que l’on ne se contente pas de les entendre, mais qu’on prenne le temps de les écouter, de lire les documents fournis puis de faire des vérifications, et des recoupements.
Vrai collectif citoyen
Dans le rapport de la commission il écrit, je cite : « il est regrettable que les pétitionnaires n’aient pas fait mention immédiatement de leur lien de parenté, mais se sont présentés comme un collectif citoyen de lanceurs d’alerte » – fin de citation.
Ca commence mal, car c’est faux : le père dont il est question n’est pas signataire des pétitions, il s’est rendu devant la commission en tant qu’expert d’un des dossiers pour accompagner l’initiatrice du collectif.Les quelques 20 signataires des pétitions ne sont pas de la même famille. Le père en question n’en connait d’ailleurs que 4 ou 5.
Ni les jeunes injustement mis en cause dans l’affaire de l’ETML et ni leur famille ne font partie des signataires. Par ailleurs, une vingtaine de familles sont personnellement touchées par ces disfonctionnements. Ce n’est donc pas un cas isolé.
Curieusement, la commission des pétitions a limité à 3 personnes le collectif citoyen devant lui alors que le DFJC est lui venu à 6 personnes dont le Chancelier!
Présumés coupables
Sur le fond de l’affaire : la conclusion du courrier daté du 3 mai est claire : il y est affirmée qu’en cas de récidive (ou de représailles), la direction sera dans l’obligation de prendre des sanctions qui pourraient aller jusqu’à l’exclusion. L’administration les considère donc comme coupable, car récidive signifie qu’il y a une première faute avérée.
Onze jours plus tard, le directeur de l’ETML écrit à l’avocat du fils que la mise à pied des jeunes n’étaient pas une sanction mais une mesure de protection de la victime, le temps de réunir les informations nécessaires à une bonne compréhenstion de la situation.
Malheureusement le mal été fait. Cette rétractation arrive bien trop tard. Par ailleurs, des élèves ont été désignés comme responsables des événements qui leur étaient reprochés. Cette suspiscion conduira d’ailleurs au moins l’un deux à abandonner ses études.
Nous avons donc une administration qui accuse des jeunes dans un premier temps puis corrige le tir sans s’excuser. Les documents remis par le collectif citoyen en atteste : le conseil de discipline a clairement disfonctionné.
Jugement sans instruction
Pire qu’une présomption de culpabilité ce fut au départ un jugement sans instruction. Le DFJC a toujours refusé de reconnaitre que le harcèlement n’a pas du tout été « clairement identifié »…
Nous pensions que la manière archaïque et maladroite dont cette affaire a été traitée appartenait à un autre temps, c’est malheureusement d’actualité.
Nous avons un certain nombre de questions à poser est espérons des réponses claires.
Des zones d’ombre
La commission a-t-elle vérifié qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre la mesure d’éloignement d’un des apprentis concernés et son échec ou le constat est-il basé sur la déclaration de représentants du DFJC ?
Comment se fait-il que l’engagement pris par le directeur de l’ETML – audible dans un enregistrement – n’a pas été tenu ? Il ressort pourtant de cet entretien qu’un consensus intelligent avait été trouvé.
Comment se fait-il que le juge instructeur choisi pour le traitement du dossier au sein de la Cour de droit administratif et public n’est autre que le président de la commission thématique « Administration des affaires juridiques » du Parti socialiste vaudois ? Ce choix n’est pas très heureux et rend le jugement sujet à caution.
Mauvais mélange des genres
Ce qui est surprenant dans cette affaire, c’est que lorsque le père concerné demande a être reçu par la cheffe du département, le refus d’entrer en matière est notifié au supérieur hiérarchique du père à la DGEO. Une affaire privée, dans laquelle il intervient en tant que père d’élève, prend alors une tournure professionnelle.
Comment se fait-il que des publications certes critiques à l’égard de sa hiérarchie, faites dans un cercle privé, soient-elles considérées comme de la diffamation ? On notera au passage qu’il n’est pas question de calomnie, mais de diffamation, ce qui sous-entend que les critiques du père d’élève ne sont pas contestées mais qu’il y aurait une simple atteinte à l’honneur du fait de leur publication. Pour autant que la DGEO comprenne la différence entre diffamation et calomnie.
Il y a encore l’intervention de groupe Impact qui finit par admettre en février 2020 qu’ils va devoir traiter le dossier jusqu’à que le processus soit interrompu par une intervention du Chancelier. Il était censé reprendre le traitement du dossier : non seulement il le fera pas mais il témoignera – avec le DFJC – devant la commission des pétitions.
Pas de remise en question
A la lecture des documents relatifs à cette affaire, on se rend compte de sa gestion catastrophique.
Nous nous étonnons que l’Etat n’ait pas une meilleure capacité d’accepter la critique et la remise en question, nous éviterions des situations conflictuelles avec de funestes conséquences.
Alors vous me direz que c’est ce qu’affirment les pétionnaires, que ce n’est qu’un son de cloche et qu’il faudrait avoir le point de vue des services de l’Etat. Mais c’est le rôle de la commission et celle-ci d’aborde malheureusement pas les questions que je viens de poser et d’autres que je n’expose pas ici pour ne pas abuser de votre patience.
Les plaignants n’ont peut-être pas fait tout tout juste, les pétionnaires n’ont peut-être pas su exposer les faits comme il l’aurait fallut, mais il n’en demeure pas moins que l’on ne peut reter impassible face à l’Etat tyrannique et sa machine à broyer.
Les Libres attendent des réponses aux questions posées et sauf révélation extraordinaire accepteront le renvoi de cette pétition au Conseil d’Etat afin que toute la lumière soit faite et les victimes de cette triste affaire réhabilitées.